Des nouvelles de BiblioDebout Toulouse

Après 7 semaines de présence quasi quotidienne sur la place, BiblioDebout Toulouse a décidé de faire une pause.  Ils expliquent pourquoi…

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BiblioDebout Toulouse

Le 86 mars, après 7 semaines de présence quasi quotidienne sur la place, nous avons décidé de faire une pause.

Tant qu’à y être, partons des débuts. A Toulouse, Bibliodebout est partie d’une impulsion : contre la Loi Travail, Nuit Debout était le lieu où il fallait être, sans savoir trop ce que cela donnerait, avec un désir impérieux de participer, et d‘agir avec ce que l’on sait faire. Avec en tête les bibliothèques de Gezi et Occupy Wall Street. Dans le même temps, un # qui passe sur twitter : #bibliodebout. En une heure, c’était plié, c’est avec des livres qu’on allait agir et participer.

Une pancarte, un stock de livres politiques et SHS issus de nos bibliothèques personnelles, nous sommes plusieurs à se retrouver sur la place du Cap, sans se connaître vraiment (ou parfois sur les réseaux sociaux); au bout d’une semaine nous serons 5 ou 6. Déjà quelqu’un a déposé quelques livres à l’accueil, et les ND nous accueillent comme si nous avions tjrs été là! L’auto-organisation est immédiate et efficace : on taggue les livres, et on décide très vite pour ne pas peser matériellement sur l’orga. Ce sera sacoche de vélo et coffre de voiture tous les jours.

La bibliodebout prend sa place, la place. Car les dons individuels arrivent rapidement. On en sollicite d’autres auprès des acteurs de la chaine du livre (comme on dit), les libraires filent des services de presse, des éditeurs leur production quand elle matche avec Nuit Debout, des bibliothécaires passent aussi déposer leurs livres, tout le monde s’y met. Chaque jour est l’occasion de nouvelles rencontres, de nouveaux ralliements à ND.

Car il y a beaucoup de passage autour de la Bibliodebout : au début, c’est le temps de la parole, de l’échange tout azimuts, il y a une énergie incroyable entre ces gens qui sont là, presque étonnés de se retrouver si nombreux sur la place. La BiblioDebout, c’est l’échange politique, mais c’est aussi l’instrument des timides : feuilleter un livre permet de s’approcher, de poser des questions, de rester là à observer, en ayant l’air occupé…avant de se lancer. Nombreux sont ceux que l’on a vu arriver seuls, et retrouvés investis dans une commission.

Et tous les soirs, de nouvelles personnes arrivent. Les premiers reviennent aussi, avec de nouveaux livres, ou pour rapporter celui qu’ils ont pris. En effet, comme souvent, c’est l’échange et le don qui surprend: réactions de surprise, recherche de don-contre-don, vouloir à tout prix donner en retour (de l’argent, du temps, un livre et pas qu’une promesse de livre) avant de partir un livre en main.

BiblioDebout Toulouse

On a expérimenté au jour le jour, testé des fonctionnements, avec plus ou moins de succès. Chaque jour, très vite, on a fait des photos, des portraits : l’occasion d’échanger (et d’obtenir l’autorisation pour la photo), on a fait quelques ateliers, testé des aménagements (joie des palettes, cartons et du marqueur), et testé de jour en jour les mérites comparés du Cote de Blaye ou du Cote du Rhône.

Coté chou blanc, nous avions l’idée d’aller plus loin dans la décentralisation qu’on voyait à l’oeuvre dans les commissions et les AG, nous avons fait des appels afin que chacun vienne sur la place avec un livre, et le soir venu, reparte avec un autre. Il faut bien dire que la proposition n’a pas eu de succès! Peut-être aurait-il fallu porter l’idée plus fort, plus longtemps…Mais finalement, tout le monde était content qu’on soit là, ça avait l’air de suffire. C’est là aussi une faiblesse : n’avoir pas su fédérer et associer les ND au delà du don de livres à BD. Si un petit stock restait toujours avec l’Accueil pour permettre que chacun ouvre la BD, la prise en main par d’autres n’a pas vraiment fonctionné.

Alors on a continué, avec énergie, volonté et plaisir aussi. Avec des compagnonnages, une pirateBox, des ateliers (philo, muséedebout, Communs…), non loin de l’espace Pitchouns, ou de l’atelier sérigraphie, on a parfois squatté l’Accueuil et testé plein d’endroits.

Et puis est venu le moment ou le stock s’est transformé. Il faut dire que nous n’avions pas eu les discussions qui ont agité le groupe Bibliodebout Paris : nos choix ont été vite faits : La bibliodebout appartenant à tous, tous les dons étaient acceptés. Pragmatiques, nous avons jeté qques titres tout pourris en fins de journée, sans se poser trop de question. L’ensemble était présenté de sorte que les titres politiques, philosophiques, ou matchant avec ND soient mis en valeur. Les autres avaient aussi leur place, car tous les lecteurs ont leur place à Nuit Debout (même si oui, ici, on aurait bien foutu un Finkie dehors!). C’est plutôt par la mise en place que le distinguo était perceptible.

Mais quand même, on aimait bien, nous, les livres qui font sens, ça donnait du sens à notre action aussi.

Alors on a commencé la collecte #debouthèque (merci encore à Paris pour le hashtag!) : du cousu main, en pair à pair, solliciter et échanger les titres qui font sens pour Nuit Debout sur des post-it, avec l’idée de constituer (pour “après”, quand on aurait du temps), la bibliographie choisie et subjective des acteurs de ND Toulouse.

Un jour, on s’est dit que certains livres qu’on trainait ne partiraient jamais. Et que nous ne nous retrouvions plus dans ce stock petit à petit appauvri. Et là, on a commencé à s’user un peu (on arrive au 70 mars environ).
Car enfin, on s’est rendu compte que si les nouveaux livres ne rentraient plus, c’est parce que des gens nouveaux ne passaient plus.
Et ça c’était autrement plus flippant. Le début de la fin quoi.

BiblioDebout Toulouse

On a continué parce que le 76 mars c’était Global Debout. GB a eu l’effet d’un déclencheur malgré le succès du rendez-vous : une bien belle journée, le retour du soleil, de nombreux ateliers et une bibliodebout qui avait de la gueule : retour des livres en pagaille, livres choisis et compagnons de route. Mais le dialogue n’a pas été du plus simple avec ceux qui, soit nous renvoyaient l’image de doux ahuris (qui donnent des livres), assez insensibles au discours des Communs ; soit tenaient des discours sur la violence et les casseurs, à l’image de ce qu’en disent les médias radio et TV, assez imperméables finalement à nos explications et à ce qu’ils avaient sous les yeux.
Nous avions monté BiblioDebout pour protester et pour agir. Pas pour occuper les badauds et passer pour des gentils allumés. Nous ne sommes pas gentils, on résiste, on résiste à notre façon en créant d’autres rapports, on est pas peace and love (oui on aurait sans doute viré Finkie^^).

Alors, que faire? (comme dirait l’autre)
Notre compagnonage, la belle équipe, et un très attendu atelier sur les Communs a fait tenir la BiblioDebout encore debout quelques jours. Et puis le 86 mars, avec une micro bibliodebout ce jour là, et presque personne sur la place, on a fini par se le dire, avec un cote de Blaye et une quiche aux asperges : pour retrouver du sens, on doit faire une pause.

Le commun que nous avons constitué autour de la Bibliothèque ne sont peut-être pas les livres à proprement parler, mais bien le lien social, le travail de médiation, autrement dit les discussions que nous avons tous eux avec des gens qui venaient voir ce qu’était NuitDebout, certains y sont restés d’autres sont repartis. Quand ce lien n’est plus nécessaire parce qu’il n’y a plus de nouvelles personnes arrivant à NuitDebout notre présence (et donc notre commun) n’est plus indispensable. C’est la raison pour laquelle, il est maintenant nécessaire de repenser BiblioDebout et de repenser ses actions comme sa forme.

Bibliodebout existe dans le cadre de NuitDebout et contre la loi travail. Il nous font maintenant inventer d’autres formes, d’autres engagements. Nous pensons qu’il faut faire et continuer en renouvelant sans cesse nos mode d’action.

La bibliothèque éphémère ne (nous) suffit plus. Peut-être que Nuit Debout, ce formidable appel d’air, ne suffit plus non plus.

On en est là. Pas de défaitisme, pas de découragement : Nous réfléchissons à d’autres formes. Contre la Loi Travail, et contre un gouvernement qui ne nous convient pas. Et pour les Communs.

On vous tient au courant.

Les Biblio Debout Toulouse

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Photos : CC 2.0 Charlotte Henard

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